Si vous ne voyez pas la colonne de gauche, cliquez
ICI
(retour au cadre et à la liste des musiciens)



Je ne connais pas d'autres sites en français sur Ludwig Senfl. Si vous en connaissez, écrivez-moi. en enlevant "-nospam" de l'adresse. Merci d'avance.
English website : see below.

SENFL, Ludwig (1486 - 1538)


Ludwig Senfl a peut-être vécu à Zurich à partir de 1488. Son père serait alors un certain Bernhart Sänfli de Fribourg devenu citoyen de Zurich cette même année. D'après son propre témoignage, Senfl devint enfant de choeur à la Hofkapelle de Maximilien Ier en 1496 ; il y fut certainement engagé à Augsbourg avant qu'elle ne soit démantelée et réorganisée à Vienne. En 1497, Heinrich Isaac fut nommé compositeur de la cour. En 1500, Isaac et la Chapelle accompagnèrent l'empereur à Augsbourg pour la session du Reichstag. Senfl y était probablement, à moins que sa voix n'ait changé, auquel cas il aurait été formé pour la prêtrise. En 1516, les garçons ayant mué recevaient une bourse pour trois ans d'études à Vienne, et Senfl étudia probablement dans cette ville entre 1500 et 1504 dans des conditions similaires. Il séjourna quelque temps à Zurich en 1504, puis, à partir de cette date, resta avec la Chapelle. Il dut recevoir au moins les ordres mineurs : une demande de résidence à la cathédrale de Bâle que l'empereur lui obtint en 1508 le décrit comme "clericus". Malgré son statut de clerc, son appartenance à la Chapelle montre qu'il y était musicien à plein temps, étudiant probablement aussi la composition avec Isaac.




Ludwig Senfl jeune
(dessin)


Ludwig Senfl
(médaillon)



Ludwig Senfl,
motet Ecce quam bonum
(parties de Discant et de Bassus)


Cliquez sur le médaillon et la partition pour les agrandir

À partir de 1507, Senfl séjourna avec la Hofkapelle à Constance pendant la réunion du Reichstag, où il fut en compagnie d'Isaac jusqu'en 1508 ou 1509. En avril 1508, Isaac fut chargé par le chapitre de la cathédrale de Constance d'écrire un cycle d'offices à l'usage de cette même ville. Il en remit une partie à la commission l'année suivante, mais le reste ne fut pas envoyé au chapitre avant novembre 1509. Senfl collabora en tant que copiste, et dit avoir copié quelque seize volumes sous la direction d'Isaac. Une partie importante de ce manuscrit fut imprimée plus tard sous le titre de Choralis constantinus (Nuremberg, 1550-1555). Il est possible que Senfl soit parti avec Isaac à Florence après 1508, puisque, en mai 1510, l'empereur donna à Senfl un bénéfice ecclésiastique dans le diocèse de Vérone. Isaac et Senfl paraissent avoir commencé à travailler sur la commission de Constance en Italie, puisque les livres de choeur originaux ont été copiés en partie sur du papier utilisé en Italie vers 1510. Des pièces de Senfl y figurent dès les premières pages de cette vaste collection. De plus, il aida Isaac à préparer les copies des compositions terminées.
Vers 1513, Senfl fut probablement de nouveau au service de la Chapelle, puis à Vienne, où il reprit le poste d'Heinrich
Isaac : dans la longue dédicace de En opus musicum festorum dierum, il se décrit lui-même comme "élève d'Isaac, qui à la mort de son maître fut chargé de lui succéder sur ordre de Sa Majesté impériale". Pendant ce temps, Senfl participa activement à des discussions dans des cercles humanistes viennois sur des questions de métrique et de rythme musical. Il était censé réaliser leurs aspirations : donner une métrique appropriée aux vers poétiques des odes classiques. L'influence de ce cercle d'érudits viennois s'étendit au-delà de l'Autriche et de la Bavière, et fit connaître Senfl aux musiciens et aux lettrés dans la totalité de l'Europe germanophone. Dès 1512, ses premiers lieder apparaissent aussi bien dans des manuscrits que dans la première anthologie musicale allemande. Senfl assista à Augsbourg à l'ouverture du dernier Reichstag de Maximilien en 1518. Il y démontra son talent de compositeur. Vers la fin du Reichstag, Martin Luther vint à Augsbourg pour comparaître devant le cardinal Caietan. Le théologien a donc pu rencontrer Senfl et entendre des répétitions de ses oeuvres.




Martin LUTHER
(1483-1546)

L'empereur Maximilien mourut début 1519, et l'on exécuta le motet de Costanzo Festa Quis dabit oculis nostris lors de ses funérailles. En 1520, la plupart des domestiques de Maximilien furent licenciés sur ordre de Charles Quint ; les musiciens reçurent une petite somme d'argent et furent renvoyés. Certains, dont Senfl, espéraient être engagés par le nouvel empereur, et vinrent le rencontrer à Augsbourg. Pendant quatre ans, Senfl essaya sans succès, de se faire embaucher par lui comme musicien et compositeur. Mais Charles préférait de toute façon ses musiciens espagnols, et les espoirs de Senfl se tournèrent vers le roi Ferdinand. Il refusa les autres offres, et au lieu de cela redemanda régulièrement aux deux rois un acompte sur la promesse écrite qu'il avait reçue de Maximilien concernant un salaire annuel de 150 guldens, salaire qui avait été réduit à 50 gulden à la mort de l'empereur. Le droit de Senfl aux 50 guldens fut confirmé, mais il se battit en vain pendant presque vingt ans ans pour recevoir son salaire. Pendant son séjour à Augsbourg entre 1519 et 1520, Senfl prépara en collaboration avec les imprimeurs locaux Grimm et Wirsung la première anthologie allemande de motets jamais imprimée. Les années 1521-1523 furent les plus difficiles de la vie de Senfl. Après avoir été au sommet de sa carrière de compositeur de la cour impériale, il était désormais obligé de se battre longuement pour assurer la reconnaissance de ses droits et une situation équivalant à une rétribution royale ou impériale. Au printemps 1521, il fut certainement présent à la Diète de Worms. D'ailleurs, certains textes des lieder de Senfl suggèrent qu'il présenta en personne des chants de prière et d'hommage lors de noces royales en 1521 et 1522. Début 1523, Senfl obtint un poste à la Hofkapelle du duc Guillaume de Bavière à Munich ; il y passa le reste de sa vie. Il organisa la Hofkapelle à la manière impériale et réussit à embaucher plusieurs chanteurs de la précédente chapelle impériale, et, selon Luther, cette chapelle avait les meilleurs musiciens d'Allemagne. L'activité de Senfl à Munich augmenta ; ses premières compositions munichoises apparaissent d'ailleurs dans plusieurs manuscrits. À côté de ses propres pièces, Senfl introduisit dans le répertoire de Munich des oeuvres de ses contemporains, en particulier d'Isaac, et certaines d'entre elles dans leur version originale destinée à la chapelle impériale. Senfl acheva la mise en polyphonie du propre de la messe pour les fêtes de l'année liturgique. Il fournit sa propre musique pour les passages incomplets, et remania le tout dans un nouvel arrangement en quatre volumes à l'usage liturgique de la Chapelle. Le titre développé et la dédicace au duc Guillaume suggèrent que cette collection, En opus musicum festorum dierum, achevée en 1531, était destinée à la publication. Apparemment, Senfl abandonna ce projet et le confia à un éditeur de Nuremberg, Formschneider. Peut-être est-ce Senfl lui-même qui relut et prépara l'édition de ces dernières pour leur publication à Munich ; quoi qu'il en soit, celle-ci n'eut pas lieu avant 1550-1555, plusieurs années après sa mort. Senfl était au courant des controverses théologiques de son temps : quoique'il n'ait pas ouvertement soutenu la Réforme de Luther, il semble en avoir été un sympathisant. De 1526 à 1540, Senfl correspondit régulièrement avec le duc Albrecht de Prusse, qui avait adopté la foi luthérienne et pour qui Senfl avait composé de nombreux lieder et motets. En retour, le duc Albrecht honora le musicien par des présents royaux. De 1530 à ses derniers jours, Senfl entretint une correspondance avec Luther, dont il avait connu les idées en assistant à la première Diète d'Augsbourg (1518), celle de Worms (1521) et la deuxième Diète d'Augsbourg (1530). Le motet Ecce quam bonum et quam iucundum habitare fratres in unum de Senfl fut exécuté à l'ouverture de la [deuxième] Diète d'Augsbourg de 1530 en guise d'exhortation à l'unité entre factions religieuses. Peu avant la fin de la Diète, Luther demanda à Senfl une composition. Luther reçut du musicien deux motets, motets pour lesquels il lui envoya une caisse de livres. Il semble que Senfl n'ait pas rencontré de difficultés à cause de ses sympathies pour la Réforme. En 1538, Senfl se plaignit au duc Albrecht d'être surchargé de travail. Il devait être très occupé à finir l'édition du Choralis constantinus, la publication avait été annoncée en 1537. De plus, un cycle de Magnificat fut publié en 1537, et en 1539, une Harmonia poetica, en collaboration avec Paul Hofhaimer, alors que Senfl préparait également de nombreuses autres collections de motets et de lieder en vue de leur publication. Il semble qu'à partir de 1540 Senfl n'ait plus composé pour la cour de Munich ou celle de Prusse, puisqu'en janvier 1543 le duc Albrecht établit de nouveaux contacts à Nuremberg pour obtenir de nouvelles compositions. Il est possible qu'à cette date Senfl soit déjà mort ; quoi qu'il en soit, les registres de Munich indiquent que la date de sa mort se situe entre le 2 décembre 1542 et le 10 août 1543.
Certaines de ses oeuvres furent mises en
tablature de luth par Hans Neusidler. On connaît une esquisse et un médaillon représentant Senfl dûs à Hans Schwarz (1519), et trois médaillons différents de Friedrich Hagenau datés de 1526, 1529 et 1530 environ. D'autres essais pour identifier des portraits de Senfl, parmi lesquels une illustration tirée du Triomphe de Maximilien de Hans Burgkmaier (1515) sont loin d'être satisfaisants. Pendant sa vie, Senfl s'attira l'estime et la louange de tous les musiciens, théoriciens et lettrés de l'Europe germanophone, et son nom ne disparut jamais totalement de l'histoire de la musique. Les traités d'Heinrich Glarean, Sebald Heyden, Hermann Faber et Lodovico Zacconi, parus du vivant de Senfl, contiennent des exemples de son oeuvre, et l'on sait que le Dodecachordon de Glarean fit autorité en matière de théorie musicale jusqu'à l'époque de Johann Sebastian Bach. On continua à chanter les odes mises en musique par Senfl dans les Lateinschulen pour apprendre les vers antiques jusqu'au XVIIè s. À la fin du XVIIIè s., l'oeuvre de Senfl fut redécouverte par les théoriciens de la musique.
L'oeuvre de Senfl représente à la fois l'apogée de l'ancienne musique allemande de la fin du Moyen Age et un sommet des nouveaux styles au début de la Réforme. En 1537, le théoricien Sebald Heyden faisait de lui le "in musica totius Germaniae nunc princeps", le prince de la musique de toute l'Allemagne ; cette réputation est largement justifiée par ses lieder et motets polyphoniques, empreints tout à la fois des caractéristiques musicales ecclésiastiques, courtoises et bourgeoises, à la différence de la musique de la plupart de ses contemporains. Ne voulant pas rompre avec la tradition, Senfl écrivit la plupart de ses messes et ses motets pour en latin ; ses compositions en style motet reposent essentiellement sur des modèles flamands, Isaac et
Josquin, dont il étudia attentivement les oeuvres, et leur sont apparentées dans leurs techniques de composition, utilisant même leurs cantus firmi. Senfl développe une large palette technique, surtout dans son adaptation polyphonique du Propre, se servant de procédés archaïques (isorythmie, double texte) aussi bien que d'ostinati, de canons et de traitement de cantus firmi préexistants. Ces procédés sont utilisé de façon typiquement germanique (ce qui transparaît davantage encore dans les pièces dont l'origine n'est pas liturgique, sans contrainte structurelle) : ses sonorités sont riches, avec des lignes mélodiques chantantes évoluant souvent en tierces et sixtes parallèles. D'autre part, les oeuvres sont compactes, sans développement ni fioritures, clarifiant ainsi le sens du texte ; c'est en cela qu'il se montre l'héritier de Josquin. Senfl écrivit quelques pièces profanes dans une langue autre que l'allemand.
La plupart de ses lieder sont profanes, mais quelques pièces dont le contenu prouve une sympathie pour la Réforme furent composées apparemment pour le duc Albrecht de Prusse. Les textes des lieder et leur adaptation musicale reflètent généralement le caractère varié des formes, qui vont de la chanson courtoise aux pièces comiques ou satiriques en passant par le chant populaire et le Gesellschaftslied. Outre une chanson évoquant sa carrière de musicien, Lust hab ich ghabt zur Musica, avec l'acrostiche "Ludwig Sennfl", un certain nombre de textes peuvent lui être attribués avec certitude. La technique employée par Senfl trouve son origine dans le Tenorlied germanique du début du siècle, quoique les pièces à quatre voix montre à l'évidence la variété des procédés contrapuntiques utilisés par les compositeurs français et flamands. Il y a d'une part des oeuvres simples en forme de lied, certaines traitant la voix de ténor comme un
cantus firmus autour duquel évoluent les autres voix, et d'autre part des structures plus complexes : quodlibet, canons et cycles sur une même teneur. Quoi qu'il en soit, Senfl s'attache toujours à restituer clairement le texte en évitant le traitement contrapuntique total du matériau mélodique. C'est une technique distincte et d'un intérêt particulier que Senfl emploie dans ses adaptations à quatre voix des odes latines de métrique classique, technique dans laquelle il subordonne totalement la musique au rythme du discours. Il en résulte que ces pièces simples, homophoniques, portent clairement la marque des lieder avec la mélodie à la voix supérieure, ce qui sera repris et développé plus tard dans la mise en musique de l'hymnologie protestante allemande.
Après sa mort, plusieurs de ses chorals furent réédités dans les Newe deutsche Geistliche Gesenge für die Gemeinen Schulen édités chez Georg
Rhau en 1544 (123 pièces de divers auteurs).



 
   

Ludwig SENFL,
Non moriar sed vivam (vers 1530)






Bibliographie sommaire (avec lien vers référence complète)


"Senfl", New Grove, T. XVII, p. 130-131.





Discographie sommaire

  • Musique de la Renaissance pour flûtes à bec. Ecole anglaise et franco-flamande, ens. Sesquitertia, ADDA AD 184, 1989-1990 (1 Tandernaken et 1 motet joué aux flûtes),
  • Ludwig Senfl : Motets, Lieder et Odes, Clemencic Consort, dir. René Clemencic, Accord, 465 942-2 DP (LC 00280) ; (P)1992, (C) 2000 (22 pièces),
  • Tugend und Untugend (Virtue and Vice), Sven Berger, ens. Convivium Musicum et Villanella, Naxos 8.553352 ; (P) et (C) 1995 (12 pièces).

English websites (alphabetical order) :

http://www.aeiou.at/aeiou.music.5.1/050104.htm http://www.karadar.net/Dictionary/senfl.html (medal)
http://www.medieval.org/emfaq/cds/acc20632.htm and
http://www.medieval.org/emfaq/cds/chr77226.htm
http://midiworld.com/cmc/renaissa.html (musical examples)
http://utopia.knoware.nl/~jsmeets/cgi-bin/ccd.cgi?comp=senfl