MONTEVERDI, Claudio (15
mai 1567 (Crémone)-29 nov. 1643 (Venise))
Né
à Crémone, Claudio Monteverdi étudia la
musique avec le célèbre théoricien
Marco Antonio Ingegneri
(1547-1592), qui lui enseigna les techniques
d'écriture, l'orgue, le violon, l'art vocal et l'art
des madrigalistes. Il conserva d'ailleurs un sentiment de
reconnaissance envers son ancien maître et aimait,
dans ses publications antérieures à 1590, se
dire son disciple. À l'âge de quinze ans,
Monteverdi composa sa première oeuvre, un ensemble de
vingt motets à trois voix.
Joueur de viole et chanteur, il entra en 1590 dans
l'orchestre de la cour du duc de Mantoue. En 1601, il y
obtint le poste de maître de musique, succédant
ainsi à Benedetto Pallavicino.
Deux ans avant, il avait épousé Claudia
Cattaneo, une chanteuse à la cour de Mantoue, avec
qui il eut trois enfants. En 1613, Monteverdi fut
nommé maître de chapelle à Saint-Marc de
Venise, l'un des postes musicaux les plus importants
d'Italie, qu'il conserva jusqu'à la fin de sa vie. A
partir de ce moment, il écrivit des motets, des
madrigaux et des messes, mais aussi de nombreux
opéras (dont beaucoup ont maintenant disparu),
oeuvres commandées par des notables de Venise et des
villes voisines. Il fut ordonné prêtre en
1632.
En 1587, Monteverdi écrivit son Premier Livre
de madrigaux, livre dans lequel prédomine une
atmosphère pastorale. En 1605, il avait
déjà composé cinq livres de madrigaux.
La texture fluide et lisse des deux premiers livres (1587 et
1590), influencés par Luca Marenzio,
tranche avec l'approche plus dissonante, incisive et
irrégulière des Troisième et
Quatrième Livre (1592 et 1603). Cette
dernière met en évidence la signification de
chacun des mots du texte, et révèle
l'influence de Jacquet de Wert,
avec qui il fut en contact lorsqu'il entra au service du duc
de Mantoue. Monteverdi subit également l'influence
des madrigalistes italiens de son temps, comme Carlo
Gesualdo.
C'est également à cette époque que
Monteverdi commença à s'intéresser aux
expériences inaugurées par le compositeur de
drames musicaux Jacopo Peri
(1561-1633), alors directeur de la musique à la cour
des Médicis.

Lettre autographe de
Monteverdi
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Page de titre de la
première édition
de l'Orfeo (1609, représenté
en 1607)
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L'Incoronazione di Poppea (Le
Couronnement de Poppée),
prologue
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Manuscrit autographe du
Lamento d'Arianna (1608)
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Le langage harmonique de
Monteverdi fut l'objet de controverses, lorsque le chanoine
Giovanni Maria Artusi
écrivit en 1600 un essai, l'Artusi ovvero Delle
imperfezioni della musica moderna (1600-1603),
attaquant, notamment deux madrigaux de Monteverdi qu'il
qualifiait d' "insupportables à l'oreille". Ces
oeuvres dépassaient de son point de vue les limites
de la polyphonie équilibrée vers laquelle
tendait la composition à la Renaissance. Les
dissonances créées par l'ornementation et
l'indépendance des voix étaient, toujours
selon lui, contraires aux règles strictes du
contrepoint. En effet, avec ses nouvelles combinaisons
harmoniques alliant le diatonique et le chromatique,
Monteverdi rompait, en effet, avec l'unité modale
qui, pour Artusi, devait être l'essence même de
l'oeuvre.
En 1607 fut représenté le premier drame
musical de Monteverdi, La
Favola d'Orfeo,
plus connue sous le nom d'Orfeo. Cet opéra,
qui surpassait toutes les tentatives de drames musicaux
précédentes, représente probablement la
contribution la plus importante au développement de
l'opéra, qui fut alors reconnu comme une forme
sérieuse d'expression musicale et
théâtrale. A travers une utilisation habile des
inflexions de la voix, Monteverdi cherche à exprimer
l'émotion comme elle aurait été
exprimée par un bon acteur, pour obtenir un langage
chromatique d'une grande liberté d'harmonie.
L'orchestre, considérablement agrandi et
varié, est employé non seulement pour
accompagner les chanteurs, mais aussi pour créer
l'atmosphère des différentes scènes et
renforcer l'évolution du drame. La partition
elle-même contient quatorze pièces orchestrales
indépendantes. L'Orfeo obtint un grand
succès auprès du public et, avec son
opéra suivant, Arianna (1608), dont ne
subsiste que l'admirable lamento,
la réputation de Monteverdi comme compositeur
d'opéra fut définitivement établie.
Dans la plus pure tradition du XVIè s., ce
Lamento d'Ariane de Monteverdi connut de nombreuses
versions d'auteurs divers (voir Discographie).
Novateur, mais respectueux de ses
prédécesseurs, Monteverdi réutilisa de
nombreux thèmes antérieurs, comme le motet
In illo tempore de Nicolas Gombert
dans la messe du même nom (1610)
La musique religieuse de Monteverdi puise donc dans toute
une gamme de styles, depuis la polyphonie à
l'ancienne de la Messe In illo tempore de 1610
jusqu'à la musique vocale virtuose venue de
l'opéra et à l'écriture des chorals
(dérivée des compositions des
prédécesseurs de Monteverdi à Venise,
Andrea Gabrieli
et Giovanni Gabrieli).
On trouve ces deux derniers styles dans les Vêpres
de la Vierge, également de 1610, et qui
constituent une de ses oeuvres les plus connues de nos
jours.
Dans ses Sixième, Septième et
Huitième Livre de madrigaux (1614-1638),
Monteverdi s'éloigne encore plus de l'idéal de
la polyphonie à voix égales de la Renaissance
pour aborder de nouveaux styles mettant l'accent sur la
mélodie, la ligne de basse et le support harmonique,
ainsi que sur la déclamation personnelle ou
théâtrale. Son Huitième Livre de
madrigaux comprend, entre autres, les Madrigali guerrieri
e amorosi (1638), véritables cantates qui
constituent davantage des scènes lyriques que des
madrigaux au sens premier du terme. Parmi ces madrigaux d'un
nouveau genre figure le Combat de Tancrède et
Clorinde.
En 1637 s'ouvrit à Venise, le premier
théâtre lyrique public, et Monteverdi
écrivit une nouvelle série d'opéras,
dont seuls deux nous sont parvenus : le Retour
d'Ulysse (1641) et le Couronnement
de Poppée
(1642). Ils comportent des scènes d'une grande
intensité dramatique dans lesquelles la musique, tant
vocale qu'orchestrale, reflète les pensées et
les émotions des personnages. Avec le Couronnement
de Poppée, les principes de l'opéra
apparaissent clairement définis. Scènes
comiques, chansons populaires, duos, etc. témoignent,
de par leur diversité, d'un genre qui veut s'ouvrir
à un public de plus en plus large. Ces deux
opéras influencèrent par la suite nombre de
compositeurs d'opéras, dont Gluck et Wagner.
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Claudio
MONTEVERDI,
extrait desVêpres de la
Vierge (1610)
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